InlenderZoa
Roman noir traduit de l’américain par Thérèse Moreau « Anna conduisait sans parler. L’épais brouillard demandait toute sa concentration. Mais dans sa tête, le film de l’ambulance roulant toutes sirènes allumées à travers Manhattan se déroulait au ralenti. Comme pour toutes les autres prémonitions, il y avait énormément de détails mais tout restait flou à cause du manque d’indices précis. Il faisait jour, elle savait que ce n’était pas la nuit. Mais quand ? Quel jour ? Aujourd’hui ou dans plusieurs années ? C’étaient pourtant l’urgence extrême de cette vision qui l’angoissait le plus. Récemment, des flots de visions s’abattaient brutalement sur elle. Elle se sentait soulevée par des vagues d’angoisse continues. Elle avait une impression de danger inconnue depuis l’enfance, quand, pendant la guerre, elle courait les bois. « Anna tenta de se calmer en respirant profondément. Elle essaya de se convaincre que la peur qui lui écrasait la poitrine venait du contact du poignard contre sa cheville, contact qui ranimait le souvenir ancien de la chaleur de l’acier contre sa peau et des vieilles terreurs. Et tous ces corbeaux, qu’elle avait vus se rassembler à sa sortie de l’aéroport de Genève. Partout où elle était allée, elle les avaient vus. Des rangées de corbeaux perchés sur les fils électriques, des corbeaux qui croassaient cruellement dans l’air cru, comptant, comme dans les contes de fées, les gens dont ils allaient s’emparer. Croassant, comptant, faisant l’appel. Mais de qui ? » Date de publication : 30/04/1989
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